La rentrée du Sénat avec le discours de politique générale d’Elisabeth BORNE

Après quatre mois d’interruption des séances publiques du Sénat en raison des élections présidentielles et législatives, nous avons pu de nouveau nous réunir dans l’hémicycle du Palais du Luxembourg afin de débattre du discours de politique générale de la Première Ministre. L’après-midi même, elle avait effectué cet exercice démocratique devant l’Assemblée nationale dans une ambiance survoltée, animée par les vociférations de nombreux députés. La Haute-Assemblée a marqué sa différence en affichant davantage d’écoute, ce qui n’a pas empêché les orateurs des différents groupes politiques d’exprimer un haut niveau d’exigence vis-à-vis du Gouvernement.

Je fais le vœu que ce climat propice à un travail de fond constructif et efficace sera entendu par la majorité présidentielle dans la nécessaire recherche du consensus le plus large, imposé par l’absence de majorité absolue à l’Assemblée nationale.

Pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, auquel j’appartiens, Patrick KANNER a posé clairement les enjeux de cette nouvelle législature, ainsi que les grands principes qui nous animeront dans les débats parlementaires.

Il est revenu sur la séquence électorale qui laisse notre démocratie exsangue tant l’abstention massive est devenue un fait politique structurant qu’il convient de combattre par tous les moyens. Cette crise de la participation n’est pas récente mais il convient de constater qu’elle s’est aggravée durant les cinq dernières années.  Après avoir théorisé et mis en œuvre la fin du clivage gauche-droite, après avoir maltraité, marginalisé les corps intermédiaires et les contre-pouvoirs, le Président de la République a provoqué, au bout de ce chemin, une déstructuration du champ politique et l’accession de 89 députés du Rassemblement National au Palais Bourbon, alors que la réduction de l’influence de ce parti était l’objectif affiché des politiques gouvernementales en 2017.

Mais cette situation, si inquiétante soit-elle, peut être le ferment d’un renouveau institutionnel. Pour cela il faut accepter et assumer la dynamique parlementaire qui s’impose au Gouvernement. Il faut accepter et assumer que les oppositions soient reconnues et respectées dans leur capacité à apporter des réponses aux défis de la France.  

Il a affirmé que les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain sont dans l’opposition au gouvernement, mais que nous voulons avant tout le redressement de la France et non son blocage. Avec exigence, nous cherchons l’apaisement et non la crise.

Pour entamer ce travail, nous aurons bientôt à examiner un projet de loi sur le pouvoir d’achat des Français.

L’inflation devrait continuer d’accélérer pour atteindre 6,8% sur un an en septembre, puis rester sur ce rythme durant les derniers mois de l’année. Une flambée qui va peser sur l’économie, avec une croissance qui peinera à atteindre 2,5% en 2022.

Et on ne revaloriserait pas le SMIC, les pensions de retraite, les minimas sociaux, le point d’indice… à la hauteur de la souffrance de millions de familles qui de plus en plus tombent par exemple dans le crédit revolving, simplement pour boucler leurs fins de mois.

Les premières propositions du Gouvernement ne compensent même pas l’inflation pour les catégories concernées et Monsieur le ministre de l’Économie et des Finances bloque toute ambition en déclarant que nous avons atteint la « côte d’alerte » en matière de finances publiques.

 

Notre ambition à nous est claire : le SMIC à 1500 euros et lancement d’une grande conférence salariale dès septembre pour préserver le pouvoir d’achat des classes populaires et des classes moyennes.

Pour ce faire, il est nécessaire de dégager de nouveaux moyens :

  • La contribution exceptionnelle des grands groupes au financement des politiques publiques dès qu’il y a « superprofit » dans le cadre d’une crise ou de toute autre conjoncture qui le justifierait.
  • L’ISF climatique.
  • L’annulation de la baisse des impôts de production décidée lors du dernier quinquennat.

Le lien entre les Français et leurs services publics doit être retissé par de l’investissement.

En priorité dans les quartiers populaires bien évidemment ; mais, encore plus impactées par un sentiment d’abandon, sont les zones rurales. La multiplication des déserts médicaux, des déserts numériques, les questions de mobilité, d’accès aux services… amènent nos concitoyens vivant dans ces territoires à être excédés à juste titre par ces inégalités de traitement.

Les fractures se creusent et se traduisent par une colère démocratique. Mais il n’y a pas de fatalité. L’État peut y remédier. Il doit y remédier.

La « côte d’alerte » est bien atteinte pour nos services publics. Mais pour résoudre ce problème, ce n’est pas dans la poche des collectivités qu’il faut aller chercher les moyens du redressement mais dans celles du CAC 40, qui a versé l’an dernier plus de 80 milliards d’euros de dividendes, ou encore dans celles des évadés fiscaux qui en font perdre autant au budget de l’État.

 

Le programme que le Gouvernement entend appliquer envers les collectivités territoriales est d’ailleurs symptomatique d’un certain dogmatisme idéologique.

Les collectivités ont déjà fait ces efforts pour contribuer au redressement des comptes publics on leur a déjà beaucoup demandé.

Aussi, envisager une suppression de la CVAE, c’est empêcher les collectivités d’avoir les moyens de leurs ambitions. Opérer des coupes sombres par petites touches n’est pas conforme à ce qui doit être fait pour des collectivités qui ont su, lors des dernières crises, compenser les carences de l’État et continuent à supporter des transferts de compétences.

Profitons de cette reparlementarisation de la vie politique pour porter ensemble, parlementaires et élus locaux, une remise à plat de leurs ressources et une refonte de leur autonomie fiscale. Je réitère ici la nécessité d’une loi de finances spécifique aux collectivités locales qui représentent près de 20% de la dépense publique. Nous y constaterions que, dépourvues de moyens dynamiques, les collectivités territoriales seront dans l’incapacité d’être à la hauteur des défis. Que ce soit le soutien au pouvoir d’achat des Français, la lutte contre le chômage, la contribution à la réforme de la dépendance dont la grande loi tant promise et si nécessaire se fait toujours attendre, ou encore la planification écologique et énergétique. 

 

Nous n’avons plus le temps de tergiverser sur la question environnementale.

En ce domaine, il n’y a pas d’alternative possible pour les générations futures. Les canicules ou les orages dantesques à répétition ne nous laissent pas le choix. Les rapports du GIEC non plus. Sinon celui d’un effort politique immense à mener dès aujourd’hui. Pourtant, le Gouvernement a choisi de reculer cela dans l’ordre de ses priorités.

Un nouveau recul après cinq ans de renoncement parmi lesquels, entre autres, le glyphosate, le soutien aux énergies fossiles, le non-respect des accords de Paris ou encore le refus d’accepter de mettre en œuvre une véritable éco-conditionnalité des aides dans les plans de relance successifs, comme nous vous l’avions proposé.  Nous ne voulons pas juste de l’écologie mais une écologie juste.

Je prendrai toute ma part à ce combat en qualité de vice-président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat.

Patrick KANNER a conclu son intervention en lui donnant acte de son projet politique : « Ce n’est pas le nôtre. Les Français en seront les témoins et finalement les juges. A votre République de l’égalité des chances au caractère si formel, nous défendrons toujours les actes pour une égalité réelle. Comptez sur le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain pour vous le rappeler en permanence ».

Je me reconnais pleinement dans cette profession de foi. Vous pourrez compter sur moi pour m’y engager dans cette nouvelle année parlementaire qui s’ouvre. N’hésitez pas à me solliciter en tant que de besoin.

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