Ce 11 mars 2021, la proposition de loi socialiste pour lutter contre la pollution plastique a été adoptée à l’unanimité par le Sénat. Elle propose des mesures concrètes pour accélérer la transition écologique. Le texte, présenté par ma collègue Angèle PREVILLE part du constat que le flux de matière plastique est tel que, ni la progression de la sensibilisation de la population ni les politiques publiques mises en place ne suffisent à endiguer l’accumulation de ces déchets dans l’environnement et que l’ensemble de la chaîne alimentaire et du vivant est ainsi contaminé. Je suis intervenu dans le cadre de la discussion générale sur ce texte.
En effet, en moins de cent ans, le plastique est devenu le troisième matériau le plus fabriqué au monde après le ciment et l’acier. Or, 81 % des plastiques mis en circulation deviennent des déchets au bout d’une année et, tous les ans, 80.000 tonnes de plastique sont rejetées sur le littoral français et dans la nature. Au rythme actuel, sans changement de modèle, cette production devrait doubler d’ici 2050.
Le texte propose ainsi des mesures ciblées afin d’encadrer les pertes et fuites de granulés des plastiques industriels, d’interdire les microbilles dans les détergents et les lâchers de ballons de baudruche et souhaite anticiper une décision européenne en interdisant l’emploi de granulés de plastiques dans les terrains de sport synthétiques à compter de 2026.
La proposition de loi a été adoptée à l’unanimité en commission de l’aménagement du territoire et du développement durable et à l’unanimité en séance publique.
Cette proposition de loi, pragmatique et volontariste, ne se contente pas de s’inscrire dans la continuité de la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (dite AGEC), elle dresse des perspectives pour les débats que nous aurons dans le cadre du projet de loi « Climat ».
Je fais le vœu que l’Assemblée nationale se saisisse à son tour de ce texte afin qu’il soit adopté dans les mêmes termes et que cette loi s’applique très rapidement.
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Vous pouvez consulter le dossier législatif sur le site du Sénat : https://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl20-164.html
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Monsieur le Président, Madame la ministre, Madame la Rapporteure, Mes chers collègues,
Il y a un peu plus d’un an nous votions ici même la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (AGEC) sur laquelle le groupe socialiste et le Sénat, dans son ensemble, avaient su rehausser les ambitions de ce texte. Cette loi a eu le mérite de poser les bonnes questions à notre société de consommation.
J’avais alors porté un amendement, conservé dans la rédaction finale de la loi, pour introduire un principe général dans le code de l’environnement selon lequel toutes les politiques publiques doivent fixer des actions à mettre en œuvre pour lutter contre la pollution des plastiques dans l’environnement et réduire l’exposition des populations aux particules de plastique.
La France, en tant que premier producteur européen de déchets plastique, doit avoir une véritable ambition en matière de lutte contre cette pollution. Car sans infléchissement de nos modèles économiques, cette production devrait doubler d’ici 2050.
Cette nouvelle proposition de loi à l’initiative de notre chère collègue Angèle PRÉVILLE – dont on connaît le sérieux et la ténacité sur ce thème – s’inscrit dans la continuité de la loi AGEC en apportant de précieuses avancées juridiques et ouvre une nouvelle séquence au Sénat en amont de l’examen du projet de loi Climat et Résilience.
Son récent rapport réalisé, avec le Député Philippe BOLO, dans le cadre de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) est extrêmement convaincant sur l’urgence d’agir contre une pollution qui s’immisce dans l’eau, l’air, profondément dans nos sols et contamine en bout de chaîne la totalité des espèces vivantes.
Pollution si massive qui conduit les scientifiques à rebaptiser l’anthropocène par le terme de plasticocène. L’histoire d’une incurie coupable que cette loi propose d’enrayer en s’attaquant frontalement et méthodiquement à la problématique des micro-plastiques.
Fort de ce constat aussi troublant qu’accablant, l’article 1er propose ainsi d’encadrer les pertes et fuites de granulés de plastiques industriels, les célèbres « larmes de sirène » que l’on retrouve quotidiennement sur nos plages jusque sur les bords de la Loire que je connais bien. L’un des problèmes de cette pollution réside dans sa capacité à capter d’autres polluants errant dans les océans et comme des pesticides ou encore des métaux lourds.
Et plus encore, cette pollution en confettis est très difficile à traiter par les collectivités en charge des déchets qui avouent leur impuissance. Par leur taille minuscule, il est quasiment impossible de procéder à des ramassages efficaces, chaque tempête déversant sur nos rivages son lot de microbilles et de plastiques déchiquetés.
Cette disposition est donc très utile car elle comble certains angles morts qui persistent dans le décret issu de l’article 83 de la loi AGEC en contraignant les sites concernés à déclarer annuellement les pertes et fuites de granulés, et en mettant en place des systèmes d’information par voie d’affichage afin de prévenir ces pertes et fuites au 1er janvier 2022.
Dans la même veine, l’interdiction de l’introduction intentionnelle de microbilles plastique dans les détergents prévue à l’article 2 est de bon sens. Nous l’avions d’ailleurs votée, ici même mes chers collègues, en première lecture de la loi AGEC. L’ensemble des secteurs industriels doit s’adapter à la nécessaire protection de l’environnement.
Le secteur des cosmétiques a démontré qu’il était possible de se conformer à l’art. 124 de la loi pour la reconquête de la biodiversité votée en 2016 interdisant les microbilles plastique dans les produits cosmétiques rincés à usage d’exfoliation ou de nettoyage. C’est une nouvelle étape qui s’ouvre aujourd’hui grâce à ce texte bien inspiré.
L’article 4 pose aussi une problématique aiguë qui demeure un impensé industriel : les microfibres plastiques contenues dans les textiles. Cette demande de rapport est un pavé dans la mare pour une industrie qui a longtemps fermé les yeux sur son impact environnemental. Le récent rapport de l’ONG Changing Markets Foundation publié le 2 février dernier démontre que l’utilisation du polyester dans les vêtements à bas coût est deux fois plus utilisé qu’il y a vingt ans.
Les auteurs de ce rapport appellent l’Union européenne à mettre en place une réglementation pour freiner cette surproduction textile issu du plastique qui, irrémédiablement se retrouve dans nos océans. Rappelons que cette pollution est loin d’être anecdotique.
En effet, le relargage de fibres textiles dans l’environnement est évalué́ au niveau européen entre 18 000 et 46 000 tonnes par an. Ce que l’on nomme la fast fashion, ou mode jetable, doit sérieusement remettre en question cet état de fait. Et ce rapport pourrait être le premier jalon utile de cette évolution.
J’aimerais d’ailleurs faire une incise et profiter de l’occasion qui m’est donnée pour demander au gouvernement ce qu’il en est de l’article 84 de la loi AGEC dont je suis à l’origine et ui prévoit un rapport sur les impacts sanitaires et environnementaux des plastiques biosourcés et biodégradables sur l’ensemble de leur cycle de vie ? Ce sujet est tout à fait en lien avec l’objet de cette proposition de loi.
En outre, les travaux de notre commission et de notre Rapporteure Martine FILLEUL, que je souhaite féliciter pour la qualité de son rapport, ont permis d’améliorer encore cette ce texte.
Nous avons ainsi introduit un nouvel article 2 bis interdisant l’emploi de granulés de plastique sur les terrains de sport synthétiques qui interviendra en 2026. Par cette disposition, nous souhaitons envoyer un message fort à la Commission européenne afin qu’elle encadre rapidement l’utilisation de ces granulés.
L’unanimité avec laquelle notre Commission a voté ce texte est de bon augure et démontre que, sur ces questions, le Sénat est capable de dépasser les clivages partisans pour l’intérêt général.
J’espère que le gouvernement, par votre voix Madame la ministre, se ralliera à ces dispositions très étayées et vitales pour déplastiquer progressivement mais sûrement notre économie et surtout notre environnement.