Ce 27 novembre 2020, je suis intervenu en séance dans le cadre du projet de loi de finances pour 2021 pour la mission Écologie, développement et mobilité durables. Cette mission est emblématique de ce projet de loi finances pour donner corps aux engagements environnementaux de la France. Le contexte inédit de pandémie, qui est en lien étroit avec la crise écologique, ne doit pas obérer la nécessité profonde de transformation. Ainsi, nous nous attendions à un volontarisme bien plus important.
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Texte de mon intervention :
Monsieur le Président, Monsieur le ministre, Mesdames, Messieurs les Rapporteurs, Chers collègues,
Nous abordons l’examen de la Mission Écologie, développement et mobilités durables, mission s’il en est emblématique de ce projet de loi finances pour donner corps aux engagements environnementaux de la France.
Le contexte inédit de pandémie, qui est en lien étroit avec la crise écologique, ne doit pas obérer la nécessité profonde de transformation. Et, de surcroît, lorsque le Conseil d’Etat, dans une décision inédite du jeudi 19 novembre, donne trois mois au gouvernement pour justifier le respect de la trajectoire de réduction des émissions carbone à horizon 2030.
Ainsi, nous nous attendions à un volontarisme bien plus important. Je ne vous surprendrai pas en vous disant que le résultat nous déçoit et ce, en dépit du plan de relance qui est de maigre consolation face à tant de renoncements. C’est aussi l’avis des citoyens de la Convention Climat.
Tant de renoncements, dis-je, et au premier chef sur le front de l’emploi public. L’année dernière déjà, j’interrogeais ici même Elisabeth BORNE pour lui demander, avec l’ensemble des syndicats du ministère de l’Écologie, de stopper la suppression des moyens humains et le démantèlement progressif du service public de l’environnement.
Cette année, rebelote, le projet de loi de finances supprime près de 800 emplois équivalents temps plein (EPTP) et cela a été pointé par l’ensemble des rapporteurs. En 3 ans, ce sont près de 4000 emplois qui ont été supprimés. Quand va-t-on arrêter d’appauvrir l’Etat de ses compétences ?
Les programmes 217, 113, 159 et 181 sont formels : tous les opérateurs de l’Etat sont touchés. 50 % des départs à la retraite ne sont pas remplacés. Le ministère de l’Ecologie est le ministère qui contribue le plus aux efforts d’économie budgétaire. Comment justifier un tel choix politique ?
Comment, par exemple, assurer les nouvelles missions dévolues à l’ADEME dans le cadre du plan de relance et par la loi AGEC ? Même avec 27 emplois supplémentaires pour la supervision des nouvelles filières REP, vous supprimez 18 emplois dans le cadre de cette Mission, le signal envoyé est illisible.
Recruter des intérimaires pour 18 mois n’est pas une solution – ce laps de temps ne permettant pas d’assurer le suivi des crédits du plan de relance ! Il faut au ministère de la transition écologique des moyens humains propres et stables qui garantissent une expertise publique indépendante et de long terme.
On ne compte plus les agences dans lesquelles nous constatons des diminutions des plafonds d’emplois alors que leurs travaux sont au cœur des politiques publiques environnementales. Je pense à l’ANSES alors que la sécurité sanitaire est au cœur de nos préoccupations, à l’Office français de la biodiversité (OFB) alors que nous assistons à l’effondrement des espèces, à Météo-France, aux Agences de l’eau ou encore à l’INERIS et j’en passe…
Pire, alors que les collectivités locales ont un réel besoin d’outillage en ingénierie de projets écologiques, l’Etat supprime également des postes au CEREMA. On déshabille Pierre sans habiller Paul. C’est encore un mauvais signal pour l’Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT) et des nouveaux Contrats de relance et de développement écologique (CRTE) sur l’ensemble des territoires. C’est incohérent.
Nous croyons profondément que la logique de destruction de l’emploi public doit être aujourd’hui remise en cause à l’aune de nos objectifs de transition écologique. Nous nous tirons une balle dans le pied, et c’est toute la chaîne de projets, toute l’ingénierie sur nos territoires, toute la mise en œuvre concrète des politiques publiques environnementales qui sont impactées. Nous espérons, dans le cadre de la discussion des amendements, pouvoir infléchir cette trajectoire.
Et voici que l’on change l’architecture des programmes pour maquiller un budget pour lui donner l’apparence d’un budget à la hausse. Hors transports, les crédits de paiement alloués à la mission « Écologie » diminuent en réalité de 6 % à périmètre constant. L’intégration du Fonds Barnier au budget général est vantée par la ministre de la transition écologique mais celle-ci nous interroge sur les motivations poursuivies.
En effet, cette budgétisation pourrait permettre au Gouvernement de pouvoir fixer chaque année des crédits budgétaires différents, tout en percevant désormais directement dans le budget de l’Etat 100% des cotisations des assurés. Nous en rediscuterons également lors des amendements. C’est un sujet important au regard de la recrudescence des catastrophes naturelles qui touchent la France.
Il ne s’agit pas ici de dresser un bilan apocalyptique de votre projet de budget ; ce n’est pas une posture que nous adoptons mais bien la conviction qu’il faut relever vos ambitions qui nous paraissent timorées au regard des enjeux climatiques.
Les amendements présentés par le groupe socialiste écologiste et républicain vous sembleront certainement démesurés, Monsieur le ministre, mais ils traduisent tous cette nécessité d’investir lourdement dans la transition écologique, dans la rénovation énergétique des bâtiments, dans les énergies renouvelables, dans les transports ferroviaires, dans l’économie circulaire pour réussir la « nouvelle grande transformation ».
Nous touchons peut-être là aux limites de l’exercice budgétaire. À force d’appauvrir les ressources de l’Etat en recettes, nous n’avons plus de quoi financer les dépenses ; l’équation est imparable et l’événement d’hier marquera les consciences.
Ainsi, pour toutes ces raisons évoquées précédemment et celles qu’exposeront bientôt ma collègue Angèle Préville, nous voterons contre les crédits de la Mission.