Retour sur l’examen par l’Assemblée nationale du projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire

L’Assemblée nationale vient de terminer l’examen en première lecture du projet de loi de lutte contre le gaspillage et pour l’économie circulaire sur lequel je m’étais très investi lors de son examen au Sénat, en qualité de chef de file des sénateurs socialistes. Le Sénat avait effectué un travail remarquable qui avait abouti à une adoption à la quasi-unanimité le 27 septembre dernier (342 voix pour, 1 voix contre).

Le Sénat avait totalement refondu le texte initial du Gouvernement et l’avait délesté de l’emprise des lobbies du plastique. Je veux bien sûr parler du projet de consigne porté mordicus par le gouvernement. En séance, j’avais longuement insisté contre cette mesure qui vise à instaurer une consigne sur les seules bouteilles plastiques. Celle-ci appauvrirait les collectivités locales au profit du petit groupe des vendeurs boissons et de la grande distribution.

Cette consigne pour recyclage est un non-sens écologique car elle vise à perpétuer la civilisation du « tout plastique » en faisant croire au consommateur qu’il fait un geste écologique en ramenant sa bouteille. Les exemples à l’étranger le démontrent, à l’image de l’Allemagne, où la mise en place de ce type de consigne a entraîné une explosion de la consommation de plastique à usage unique.

De plus, cette consigne risque de déstabiliser notre service public des déchets dont l’efficacité a fait ses preuves. En retirant du « bac jaune » les bouteilles en plastique au profit d’une consigne privatisée, nous amputerions l’une des rares sources de revenu des collectivités en matière de gestion des déchets.

C’est pourquoi je suis indigné que le gouvernement ait réintroduit, après une passe d’armes houleuse en séance à l’Assemblée nationale, sa mesure initiale en décalant l’entrée en vigueur d’une année passant de 2022 à 2023 afin de permettre à des organismes privés d’installer des collecteurs de bouteilles plastiques.

Contrairement aux déclarations rassurantes du Président de la République lors du Congrès des maires, le dispositif défendu par le gouvernement en séance permet l’installation de collecteurs d’entreprises privée au mépris de l’accord des collectivités territoriales en charge des déchets. Il s’agit là d’une nouvelle trahison inacceptable de la parole présidentielle et de la concertation menée avec les collectivités qui ont, à juste titre, fortement exprimé leur opposition à la nouvelle mouture gouvernementale.

Si obscur que ce débat puisse apparaître aux néophytes, le principal problème que pose la consigne pour recyclage des bouteilles plastiques est en réalité la répercussion du coût pour le citoyen qui devra payer trois fois : la consigne en elle-même de 0,20 cts par bouteille, le nouveau geste de tri au lieu de mettre sa bouteille dans le « bac jaune » habituel, et enfin la hausse inévitable de la taxe sur les ordures ménagères pour compenser les pertes de recettes de la collectivité. Et tout ceci, au seul bénéfice des industriels de la boisson sans remettre en cause la consommation de plastique…

Je m’étonne de constater un tel acharnement pour défendre une fausse bonne idée au mépris de la voix des territoires ! Attaquons-nous aux vrais problèmes comme les bouteilles plastiques consommées hors du domicile qui échappent aujourd’hui à la collecte sélective.

Cependant, cette affaire de la consigne pour recyclage ne doit pas éclipser les bons apports de ce texte qui sont bien réels et que j’ai contribué à améliorer au Sénat.

Ainsi, nombre de mes amendements adoptés ont été conservés : sur la lutte contre la pollution plastique, sur l’information du consommateur, sur les perturbateurs endocriniens notamment, l’accès aux pièces détachées, la prise en compte de la performance environnementale des biens, de nouvelles filières industrielles en charge des déchets qu’elles produisent (REP), la création d’un fonds de réemploi solidaire pour les acteurs associatifs locaux, l’interdiction de détruire des invendus, etc.

Futur membre de la Commission mixte paritaire qui devrait se tenir en janvier 2020, je défendrai des amendements pour faire en sorte de conserver ces acquis importants tout en préservant le service public des déchets sans diminuer le pouvoir d’achat des citoyens.

Espérons que d’ici là, les fêtes de fin d’année permettront aux membres du Gouvernement de prendre un peu de recul et de recoller à l’intérêt général sur la consigne qui a depuis trop longtemps focalisé l’attention et amoindri le débat sur le véritable enjeu d’avenir que représente l’économie circulaire.

A suivre…

N'hésitez pas à partager cet article
Pour marque-pages : Permaliens.

Les commentaires sont fermés