J’ai voté, sans surprise, contre le projet de loi de finances pour 2020

Le projet de budget du Gouvernement pour 2020 n’est pas à la hauteur des enjeux économiques et sociaux et de l’urgence climatique. Avec mes collègues sénatrices et sénateurs socialistes, nous avons fait des propositions ambitieuses pour répondre aux enjeux d’aujourd’hui.

Au niveau des recettes, nous avons voulu instaurer un impôt de solidarité sur la fortune rénové ou encore un impôt sur le revenu plus progressif afin de répondre aux demandes de justice sociale de nos concitoyens. Malheureusement le Gouvernement s’est entêté en confirmant une politique économique privilégiant les plus aisés, ignorant l’accroissement des inégalités dans notre pays et ses conséquences sociales.

En matière de transition écologique, nous observons quelques mesures qui seront sans doute utiles. Mais je regrette qu’aucune de nos propositions, sur le CITE ou sur la fiscalité des transports, n’ait été retenue. De manière plus générale, il n’y a pas, dans le texte, de logique d’ensemble en matière de développement durable, alors que l’urgence climatique est aujourd’hui unanimement proclamée.

Les territoires sont encore les grands oubliés. Contrairement au Gouvernement, je veux rappeler mon attachement aux territoires et aux collectivités locales. Dans cet état d’esprit, j’ai soutenu la compensation pour les collectivités de la disparition de la taxe d’habitation, adoptée à une très large majorité au Sénat. Mais j’aurais souhaité aller plus loin et que la majorité sénatoriale puisse mieux entendre la grogne des territoires et de ses élus.

Bien sûr, projet de loi de finances comprend de nombreux points consensuels qui ne posent pas de difficultés. Nous avons ainsi approuvé les crédits de onze missions. Sur la mission « Défense », notamment, je salue le respect des engagements pris par le Gouvernement dans la continuité de l’action engagée sous la Présidence de François Hollande.

Toutefois, sur plus deux tiers des missions, je me suis opposé au Gouvernement et à la droite sénatoriale.

Quelques missions budgétaires sont très révélatrices à cet égard :

  • Le budget de l’Enseignement supérieur et de la Recherche quasiment stable, n’est ainsi pas à la hauteur de la précarité à laquelle sont confrontés beaucoup d’étudiants.
  • Sur la mission Cohésion des territoires, le logement est, une nouvelle fois, une simple variable d’ajustement. En effet, les coupes ont été particulièrement violentes dans le secteur HLM qui a perdu 1,3 milliard d’euros en 2018 puis en 2019 et 2020. En raison de cette politique, l’investissement dans les logements sociaux est trop souvent freiné.

Par ailleurs, je suis intervenu dans les débats pour renforcer les moyens de l’Agence Nationale de Cohésion des Territoires pour lui permettre d’assurer l’ingénierie des projets et lui donner les moyens de mettre en œuvre de nouveaux projets et à crédibiliser ce nouvel outil au service des territoires.

Cette agence devrait être opérationnelle le 1er janvier 2020. Notre ambition initiale était de créer une structure légère, dédiée aux territoires les plus fragiles, afin de les accompagner dans la mise en œuvre de leurs projets. La création de cette agence devait répondre au besoin exprimé par les élus locaux de disposer d’un interlocuteur unique capable d’apporter des solutions opérationnelles pour les aider à développer leurs projets de territoire.

Au final, le Gouvernement a mis en place une agence d’État assez lourde, fruit de la fusion de trois opérateurs, à savoir le CGET, l’Épareca et l’Agence du numérique. Il s’agit donc davantage d’un redéploiement de moyens, alors que l’ensemble des élus locaux attendaient des moyens nouveaux pour les territoires les plus fragiles.

Cette agence va par ailleurs fédérer de nombreux opérateurs publics via des conventions partenariales, notamment l’Ademe, le Cerema, l’ANAH ou encore l’ANRU. Elle devra en outre soutenir des programmes tels que Action cœur de ville et les maisons France services, le Président de la République ayant annoncé que chaque canton disposerait bientôt d’une telle maison afin de permettre aux Français d’accéder plus facilement aux services publics.

Concrètement, il sera demandé à l’Agence de coordonner et d’animer des programmes politiques allant de la politique de la ville à l’Agenda rural, de mener à bien une mission de recherche et de prospection, mais aussi d’avoir une capacité de projection dans les territoires afin d’appuyer l’État déconcentré et décentralisé en matière de mise en œuvre de projets complexes. De telles attributions nécessitent des moyens importants. Or ils ne sont pas mis en œuvre aujourd’hui.

Le Gouvernement trompe les Français. La « revalorisation » des prestations sociales proposée (notamment APL et l’allocation adultes handicapés) est seulement de 0.3 % alors que l’inflation pour 2020 sera de 1.3 %. En 2020, comme en 2018 et en 2019, les Français les plus fragiles vont mécaniquement perdre du pouvoir d’achat.

Alors que de nombreux Français se sont mobilisés contre la réforme des retraites mais aussi en filigrane contre les orientations libérales de la politique menée, ce budget est la traduction de la politique injuste menée par le Gouvernement, avec une certaine complicité de la droite sénatoriale. Les masques tombent, les convergences de vues entre la majorité présidentielle et la droite s’affichent désormais ouvertement.

Le « en même temps » du gouvernement, c’est d’une main, dénoncer les supposés « privilèges » des Français, avec la désindexation des prestations sociales, la réforme de l’assurance chômage ou encore la réforme des retraites… ; et de l’autre main, caresser dans le sens du poil, les plus aisés de nos concitoyens.

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