L’assemblée nationale a adopté en première lecture le Projet de loi « pour une école de confiance ». Ce texte suscite légitimement inquiétudes et défiance de l’ensemble de la communauté éducative. J’ai rencontré de nombreux représentants de différentes écoles de notre département ces dernières semaines afin de recueillir leurs réactions face à un projet de loi élaboré en catimini au mépris des principes élémentaires de dialogue et de concertation.
Je veux insister tout particulièrement sur cinq points cruciaux qui justifient mon opposition à ce texte.
L’article 1 qui porte sur l’exemplarité des membres de la communauté éducative qui met en danger la liberté d’expression des enseignants ;
La scolarisation obligatoire à 3 ans, qui est purement symbolique car 97% des enfants de trois ans sont d’ores et déjà scolarisés. L’obligation scolaire à 3 ans ne bénéficiera donc principalement qu’aux écoles privées ;
L’article 9 qui supprime le Cnesco, instance indépendante chargé d’évaluer l’organisation et les résultats de l’enseignement scolaire, pour créer le « Conseil d’évaluation de l’Ecole » composé de 10 membres dont 8 choisis par le ministre. Le ministre sera donc évalué par lui-même ;
La scolarisation des enfants en situation de handicap qui était la grande oubliée du projet de loi initial car il n’était pas fait mention une seule fois de ce sujet dans le texte. Le Ministre a toutefois fait quelques maigres concessions sur le statut des accompagnants.
L’article 6 quater qui permet la fusion des écoles primaires et des collèges par la création des « établissements publics locaux d’enseignement des savoirs fondamentaux ». Cet article est issu d’un amendement adopté dans la précipitation en commission, en l’absence d’étude d’impact préjudiciable à l’éclairage de la représentation nationale, sans avis du Conseil d’État et avec un manque de concertation avec la communauté éducative.
Cet amendement était notamment fondé sur l’existence d’expérimentations. Elles n’ont toutefois fait l’objet d’aucune évaluation. J’aimerais qu’avant qu’on puisse les transcrire dans la loi, elles fassent l’objet d’évaluations très précises et complètes, afin de nous permettre de prendre une décision quant à la suite à leur donner.
Ces établissements publics des savoirs fondamentaux suscitent actuellement des réactions de la part de la communauté éducative, mais aussi des associations d’élus qui s’inquiètent que la création de ces établissements soit le prétexte d’opérer des regroupements pédagogiques, aboutissant, in fine, à fermer des établissements dans le milieu rural.
A cet égard, l’exposé sommaire de cet amendement précisait que les nouvelles structures « permettront aussi à de très petites écoles – la moitié des 45 000 écoles de France comptent moins de quatre classes – d’atteindre une taille critique ». On peut craindre que celles-ci soient un prétexte pour effectuer des regroupements pédagogiques, loin de l’objectif de continuité du cycle 3.
Je suis bien évidemment favorable à renforcer la continuité pédagogique entre les écoles primaires et les collèges. Il existe d’ailleurs déjà les conseils écoles-collèges : pourquoi ne pas les renforcer ? En revanche, la création précipitée de ces établissements publics locaux d’enseignement des savoirs fondamentaux me semble prématurée.
En outre, ce texte pose un véritable problème de forme : il n’a fait l’objet d’aucune concertation préalable avec les syndicats et il a été rejeté par l’ensemble des instances consultatives alors même qu’il aborde de très nombreux sujets tels que la formation des enseignants, l’instruction obligatoire dès trois ans, la refonte de l’évaluation ou encore le nouveau découpage territorial des académies.
Si ce texte restait en l’état à la suite de son passage au Sénat, je voterais contre. Vous pouvez donc compter sur ma mobilisation afin de m’y opposer lors de son examen au Sénat à partir du 14 mai 2019.