La loi « agriculture et alimentation » n’est pas à la hauteur des enjeux !

Ce 2 juillet 2018, le Sénat a adopté en première lecture le projet de loi « pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous ». Comme les membres du groupe socialiste, je me suis opposé à ce texte qui ne répond pas suffisamment aux enjeux considérables que nous avons à relever dans ces domaines.

Le gouvernement qui avait pourtant affiché de grandes ambitions aux Etats généraux de l’alimentation a finalement présenté un texte sans ambition dont la droite sénatoriale a encore réduit la portée.

Le texte censé accroître le revenu des producteurs, ne garantit en rien que la grande distribution acceptera des contrats qu’elle ne jugera pas en sa faveur ni qu’elle ne poursuivra pas sa guerre des prix bas, au besoin en se fournissant ailleurs.

Ainsi, le Gouvernement, comme la majorité sénatoriale ont refusé nos propositions de reconnaître dans la loi l’importance de l’agriculture de groupe, se sont opposés systématiquement aux amendements faisant référence à l’agroécologie, ou encore, ont rejeté toute interdiction de la déforestation importée.

Le Gouvernement et le Sénat ont également rejeté mon amendement visant à renforcer l’acquisition de produits issus du commerce équitable.  Le commerce équitable n’oppose pas justice économique et protection de l’environnement. Au contraire, la part des produits équitables également Bio continue de progresser : aujourd’hui 80% des produits équitables portent la double labellisation.  Le commerce équitable est donc un levier efficace pour accélérer la transition agroécologique de l’agriculture en France et dans les pays du Sud. Il s’agissait donc de se doter d’un levier complémentaire pour accélérer le déploiement d’une agroécologie solidaire au Nord comme au Sud. Par ailleurs, la montée en gamme de l’alimentation dans la restauration collective ne peut s’envisager sans les territoires. Ainsi, cet amendement proposait de favoriser les circuits courts en réinscrivant les projets alimentaires territoriaux, créés par la loi d’avenir agricole de 2014, au cœur de ce dispositif.

De plus, la droite sénatoriale a notamment supprimé la mise en place d’objectifs clairs pour la réduction du sucre, du sel et du taux de matière grasse dans les aliments transformés ou l’obligation d’affichage de certaines mentions sur les aliments (OGM, mode d’élevage).

Elle a rejeté les amendements socialistes permettant de renforcer la qualité alimentaire des repas dans la restauration scolaire ou collective (mise en place de plan de progression dans les établissements) ou l’interdiction de la publicité pour les aliments transformés à destination du jeune public.

Concernant le glyphosate, les sénateurs socialistes ont proposé, sans succès, une solution de compromis avec une interdiction en 2021 accompagnée d’une obligation d’étiquetage des produits d’importation traités au glyphosate et d’une interdiction d’importation de tous les produits contenant des substances actives non autorisées au niveau européen.

Je me réjouis néanmoins de l’adoption du fonds d’indemnisation pour les victimes de produits phytosanitaires, à l’initiative de ma collègue Nicole Bonnefoy.

Je me suis exprimé dans les débats sur l’article 1er du projet de loi qui dresse la liste des clauses minimales qui doivent être obligatoirement présentes dans les contrats ou accords-cadres écrits. Il y est notamment prévu des délais de préavis et une indemnité réduits en cas de résiliation de contrat dans l’hypothèse d’un changement de mode de production. J’ai défendu un amendement visant à ne pas appliquer d’indemnité de résiliation de contrat en cas de modification du mode de production vers une production biologique. Il s’agissait d’encourager la transition vers des modes de production biologique en ne pénalisant pas les agriculteurs qui décident de s’engager dans cette voie. Ils subissent déjà une perte de revenus pendant une certaine période. Cet amendement a été repris et adopté, je m’en félicite.

Quant à la suppression en commission de l’objectif de 20% de bio dans les cantines, nous avons frôlé la catastrophe. Heureusement, dans un sursaut de bon sens, cet objectif a été rétabli en séance publique.

Malgré ces quelques avancées, j’ai donc rejeté un texte profondément décevant sur des sujets pourtant essentiels pour le revenu des agriculteurs et de nos concitoyens. Il sera désormais examiné en seconde lecture par l’Assemblée nationale.

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